Jonathan Clauss : “J’ai encore cette fibre du jeune qui découvre le haut niveau !”

Jonathan CLAUSS – 3 avril 2021 – RC Lens vs Lyon – Photo par Matthieu Mirville/Icon Sport

Une superbe saison et un trophée de meilleur latéral droit de la saison 2020-2021 de Ligue 1 plus tard, le tardif mais pas moins talentueux Jonathan Clauss est de retour sur les pelouses françaises avec le RC Lens. Pour Footballogue, l’ancien pensionnaire de Bundesliga 2 nous donne son éclairage sur la métamorphose du poste de latéral droit et nous livre ses ambitions pour le futur. 

 

Après une saison totalement réussie sur le plan collectif et individuel, ainsi qu’un maintien acquis rapidement, quelles sont les ambitions du RC Lens pour cette saison ?

Pour cette année, l’objectif est le même que l’année dernière : valider le maintien le plus vite possible, et ensuite essayer de grapiller des places. On aimerait faire aussi bien voire mieux que l’année dernière mais l’objectif premier c’est le maintien. Pourquoi pas faire un coup en Coupe de France.

 

Tu vas vivre ta première saison sous les couleurs du RC Lens avec du public, tu as hâte ?

Je l’ai dit après le match face à l’Udinese, en amical, c’était juste incroyable. Il y avait entre 12 et 15 000 personnes, c’était extraordinaire, l’ambiance était folle. J’avais hâte d’arriver à samedi (face à Saint-Etienne, 2-2), je voyais que c’était à guichets fermés.

En arrivant à Lens j’avais envie de retrouver l’ambiance allemande, l’euphorie, un stade qui chante. Je suis très bien tombé.

 

Sur le plan personnel, tu as réussi une superbe saison en étant un des meilleurs latéraux de Ligue 1. Tu as même été dans l’équipe type UNFP de la saison. Tu as été sollicité cet été ?

C’est une fierté, forcément. J’ai réanalysé ma saison et, même si elle a été bonne sur le plan statistique (7 passes décisives, 3 buts ndlr), j’ai eu quelques mois d’adaptation. Ma saison 2020-2021, c’est plus 7 bons mois qu’une saison complète. Sur ça, je pense que je peux aller grapiller des choses en ce début de saison 2021-2022 (pour mieux commencer ndlr). Avec la préparation et les automatismes que je commence à prendre, ça devrait le faire.

Les rumeurs c’est bien beau mais moi, tant que Lens n’a rien sur la table et tant que je n’ai rien sur la table, ça ne sert à rien de discuter. Arnaud Pouille (directeur général ndlr) et Florent Ghisolfi (coordinateur sportif ndlr) le savaient très bien, ils m’ont dit : le jour où on a quelque chose sur la table on t’appelle, et on discute avec toi. Ça resterait une discussion d’adultes, chacun donnerait son avis… Chacun a ses ambitions. On est capable de se mettre autour d’une table pour discuter.

 

Au RC Lens, tu joues un poste de piston qui est hybride, entre attaque et défense. Comment vois-tu l’évolution du poste de latéral droit depuis quelques années ?

Je trouve que c’est surtout dans le foot en général (l’évolution ndlr). On a besoin de faire beaucoup plus : en tant que latéral, attaquer plus ; en tant qu’ailier, plus défendre et en tant que milieu, dépasser la fonction simple de « relanceur » ou de milieu « classique ». C’est un collectif qui permet de dépasser la fonction même du poste. Ça a été le cas l’année dernière avec Lens. Exemple, les attaquants (Sotoca, Kakuta, Ganago, Kalimuendo, Banza, Jean), qui ont passé beaucoup de temps à défendre, ce qui ne leur était pas demandé avant.

 

Tu as toujours été un latéral offensif ou tu as travaillé au fil des ans pour être plus dans la « norme » ?

Je l’ai toujours été, j’ai été formé ailier. Vite aller vers l’avant, ça a toujours été mon objectif. Ce poste-là me permet d’allier les deux (attaque et défense ndlr).

 

Certains reprochent aux joueurs dans ton profil leur tendance à s’oublier un peu en défense ?

C’étaient les discussions qu’on avait avec le coach la saison dernière. Il avait des garanties sur mes qualités offensives, il en avait un peu moins sur mes qualités défensives. Ça a été un de mes axes de progression. L’exemple du match contre Rennes (1ère journée, 1-1 ndlr) est bon. Je n’ai pas touché beaucoup de ballons, mais j’ai su être constant et rigoureux défensivement. Avant je savais moins le faire, j’étais très moyen défensivement. J’ai évolué dans ma fonction défensive, j’ai progressé là-dessus à Lens. On m’a souvent rappelé que j’étais avant tout un défenseur.  

 

Quand on était petit, on disait souvent qu’on mettait le plus mauvais au poste de latéral droit. Aujourd’hui le poste de latéral est un des plus prisés dans le football. Qu’en penses-tu ?

C’est vrai que ce poste a souvent été stigmatisé, notamment au travers de montages photos sur Internet… On mettait souvent le dernier de la classe latéral droit (rire). Je suis content que ce poste ait évolué, c’est un poste qui peut amener énormément de solutions offensives dans un 4-4-2 par exemple, car il permet de multiplier les possibilités, avec notamment les dédoublements.

 

En France justement, on a l’impression d’avoir eu un « trou » au poste de latéral droit. Comment tu l’expliquerais ?

C’est un poste qui se joue à l’instinct. Bien sûr il faut être formé, il faut savoir défendre, relancer, aimer se projeter vers l’avant. Il y a beaucoup de choses qui se font à l’instinct. Je me suis rendu compte l’année dernière que pas tout le monde peut aimer jouer au poste de piston. Il y a deux grandes difficultés : la condition physique, et le fait que quand on est formé pour défendre, on défend et quand on est formé pour attaquer, on attaque. Il faut trouver un juste milieu. Il y a une évolution dans la formation mais pour moi l’instinct joue beaucoup, ce n’est pas facile de trouver les bons profils.

 

Ton joueur préféré quand tu étais jeune, c’était un attaquant ou un défenseur du coup ?

J’avais comme exemple Daniel Alves. C’est typiquement le mec qui m’a fait prendre conscience qu’en tant que latéral tu pouvais attaquer. Ça a toujours été Dani Alves, avant Neymar (rire)… Les deux ont été des modèles.

 

Tu as la fibre brésilienne…

Exactement ! Bon je n’ai pas les pieds encore… (rire).  

 

Tu as un parcours atypique, tu as éclos sur le tard. À 28 ans, comment vois-tu le futur ?

En ayant commencé tard, je pense que je vais être « blasé » dans longtemps. J’ai tellement poussé pour arriver là où je suis… Je prends énormément de plaisir à chaque fois que je viens à l’entraînement, que je rentre dans un stade, sur un terrain… Cela me permet de me sentir encore jeune dans ma façon de vivre les choses. C’est peut-être ça qui me fait performer aujourd’hui. Même en ayant « explosé » tard, j’ai encore cette fibre du jeune qui découvre le haut niveau. Je me donne à 2000%, puisqu’après tout ce qu’il s’est passé je ne peux pas permettre de relâcher quoi que ce soit.

Le parcours de Jonathan Clauss, qui a joué son tout premier match de Ligue 1 la saison dernière :

2013-2015 : SV Linx
2015-2016 : US Raon-l’Etape
2016-2017 : US Avranches
2017-2018 : US Quevilly-Rouen
2018-2020 : Arminia Bielefeld
2020- : RC Lens SV Lin

 

Il y a un petit attaquant argentin qui va venir en Ligue 1, tu en as entendu parler on imagine ? Tu vas sans doute jouer contre lui…

Oui j’ai cru en entendre parler (rire)… Pour moi c’est exceptionnel. J’avais comme rêve d’un jour rencontrer Neymar, il y a environ 5 ans. L’année dernière, au Parc des Princes, je me suis arrêté en le voyant arriver sur le terrain. Je me disais « c’est dingue il est là ». J’avais pris une réflexion par le préparateur physique, qui me disait « oh tu t’échauffes ! ». Je lui avais dit « Attend deux secondes ». J’avais juste envie de le regarder.

(Sur Messi) C’est quelqu’un qu’on a connu au travers de la télé, et aujourd’hui les gens viendront au stade pour le voir et nous on sera sur le terrain face à lui, le meilleur joueur du monde… Ça va faire du bien à la Ligue 1, et à la France en général.

Interview par Paul Avignon