Ilan Kebbal : “N’importe quel joueur en France est heureux de jouer au Vélodrome”

Son passage compliqué du monde amateur au monde pro, l’importance des prêts pour les jeunes joueurs, la sélection algérienne, son amour pour l’OM et Messi : le polyvalent rémois Elian Kebbal (24 ans) nous raconte son éclosion tardive. 

 

Tu viens de boucler ta première saison en tant que titulaire en Ligue 1 (31 matchs, 1 but, 4 passes décisives). Quels enseignements peux-tu tirer de cette première expérience ?

Ça a été une année assez riche en émotion. C’était ma première saison en Ligue 1. Il m’a fallu un petit temps d’adaptation. J’ai bien démarré puis, après, j’ai un peu stagné. Je suis assez content de moi. J’espère faire mieux cette saison.

Au début de saison, les équipes adverses ne me connaissaient pas forcément. Ensuite, elles se sont adaptées, j’avais un marquage plus pressant sur moi. Cela m’a fait évoluer dans mon jeu. À Reims, c’était vraiment un travail d’équipe la saison dernière : le collectif passait avant l’individuel. J’ai reculé au milieu de terrain en deuxième partie de saison, en 8. C’était moins simple de me mettre en avant, j’étais loin du but. J’ai joué à plusieurs postes, le coach m’a fait confiance et c’est l’essentiel.

 

Tu es plutôt un joueur offensif, qui aime avoir le ballon dans les pieds, cela ne t’a pas frustré d’être placé plus bas ?

De base, mon poste c’est plutôt ailier droit. Je rentre beaucoup dans l’axe. Je peux aussi jouer au milieu de terrain, en 10, notamment. Cette saison, j’ai découvert le poste de numéro 8 notamment, j’ai joué à énormément des postes par ailleurs. C’est bon à prendre, je suis plutôt polyvalent désormais. Si le coach a besoin de moi, je suis disponible à plusieurs postes.

Le coach me voyait bien dans un rôle plus bas que ma position habituelle, afin que je puisse lancer les actions avec le jeu devant moi. J’ai été obligé de m’adapter, sinon je ne jouais pas. Le coach m’a fait reculer, tout en me laissant une certaine liberté. Cela m’a appris beaucoup, notamment défensivement. Je sens que j’ai progressé.

 

Tu as signé à Reims en provenance du FC Côte Bleue (National 3) en 2019. Comment s’est passée ton arrivée ? 

Je monte à Reims, je fais un essai. J’ai fait un entraînement, et le lendemain ils sont venus me chercher pour me proposer de signer en Pro 2, avec un contrat pro. Reims, ce qui est bien, c’est qu’ils font beaucoup de paris. Dans le foot il n’y aucune certitude, et ça Reims l’a compris. Les autres clubs, c’est vraiment rare qu’ils recrutent dans des clubs amateurs. Il y a eu la même chose avec Boulaye Dia, qu’ils sont allés chercher en N2 je crois.

 

Tu as effectué deux prêts, un à Lyon Duchère et un à Dunkerque. Qu’est-ce que ces prêts t’ont apporté ? 

En 2020, je suis parti en prêt à Lyon Duchère (N1), j’ai fait 5 matchs et j’ai mis 2 buts. La saison s’est arrêtée, à cause du Covid. Suite à ces 5 matchs, j’ai signé à Dunkerque. Cette expérience est un très très bon souvenir, puisque j’ai performé. Je suis revenu à Reims avec un meilleur bagage. 

Si j’étais resté à Reims, sans faire cette saison à Dunkerque, je n’aurais certainement pas joué. Il fallait partir. Ce n’est pas parce qu’on te dit « on te prête » qu’on ne croit pas en toi. Si on te prête et que t’es sûr de tes qualités, quand tu vas revenir, tu ne seras plus le même joueur. Le club t’a fait confiance pour un prêt, il faut que tu performes !

 

Le parcours d’Ilian Kebbal :

Formé au Burel FC (Marseille)
2016-18 : Girondins de Bordeaux (U19)
2018-19 : FC Côte Bleue (N3)
2019-20 : Stade de Reims (PRO2)
2020-20 : Prêt à Lyon La Duchère (N1)
2020-21 : Prêt à Dunkerque (L2)
2021-22 : Stade de Reims (L1)

 

Tu es notamment passé par Bordeaux lors de ta formation, peux-tu nous raconter ce passage ? 

Toujours pareil, un essai. J’ai fait un tournoi U19 avec eux. Je suis monté un lundi, et mercredi on m’a proposé un contrat. J’avais le choix entre l’Atletico de Madrid et Bordeaux. Mon idée c’était de rester en France, je n’ai pas hésité une seconde.

La première année s’est assez bien passée. À l’issue de la première saison, le coach Battiston, avec qui je m’entendais bien, part à la formation et n’est plus le coach de l’équipe première. La seconde année, je n’ai pas joué. Pour moi, ce n’était pas mérité. C’est mon avis, après les coachs ont pris leur décision. C’est vrai que je n’étais pas le premier en salle de muscu, j’étais un peu flemmard. J’en avais besoin en plus… Pour moi, la vérité c’était le terrain. J’étais bon, j’aurais pu jouer, un minimum. La deuxième année, j’étais vraiment mis au placard. On m’a même demandé d’aller m’entraîner avec les U17, et écarté des confrontations contre le groupe pro.

C’était vraiment difficile pour moi, quand on est jeune, qu’on ne joue pas au foot, qu’on est loin de sa famille… Quand tu n’as pas de confiance, tu te dis que tu es nul. Il y avait plein de petits jeunes qui jouaient à ma place. Je me demandais si j’avais le niveau. Cette épreuve m’a beaucoup aidé. J’ai beaucoup de regrets par rapport à Bordeaux, puisque c’est un club que j’aimais beaucoup. Après, grâce à cet épisode, j’ai atterri à Reims, donc c’est un mal pour un bien.

 

En tant que natif de Marseille, quel est ton rapport à l’Olympique de Marseille ?

Je ne connais pas un marseillais qui n’est pas supporter de l’OM. Je suis né à Marseille, je suis né dans le foot. J’ai eu la chance de jouer au Vélodrome avec Reims l’année dernière, c’est des images qui vont rester gravées à vie. N’importe quel joueur en France est heureux de jouer au Vélodrome. Ils sont tous choqués par l’ambiance. On joue au foot pour ce genre d’émotion. Mon rêve, c’était d’être pro, jamais je me suis dit que j’allais jouer au Vélodrome. Je me sens chanceux !

 

Tu as choisi d’évoluer avec l’équipe nationale d’Algérie. Tu as même été appelé en octobre 2021 par Djamel Belmadi. Qu’est-ce que cette sélection représente pour toi ?

Je suis né en France, je suis français d’origine algérienne. On né avec ses origines, je n’ai pas hésité une seconde. Mes parents, mes grands-parents, c’était une fierté pour eux, même pour moi. Maintenant, c’est à moi d’être bon sur le terrain. Je n’ai pas eu de contact avec le sélectionneur Belmadi récemment. La sélection algérienne est de qualité, notamment sur la plan offensif. Il n’y a jamais eu autant de joueurs. Je pense pouvoir servir en sélection, puisque je peux jouer partout. La saison dernière, j’ai joué faux numéro 9, 10, ailier, 8… J’essaye de performer avec Reims, après on verra.

 

Ton coéquipier en sélection, Riyad Mahrez, est un joueur qui a également connu une éclosion sur le tard par rapport à d’autres joueurs. Est-il un exemple pour toi ?

C’est ce genre de joueur que j’aime regarder à la TV. Il provoque, il drible, il a un beau touché de balle… C’est le foot qu’on aime ! Riyad, ça doit être un exemple pour chaque joueur. Il a jamais rien lâché, il a pratiquement tout gagné. C’est un honneur de l’avoir côtoyé.

 

Quel joueur t’a inspiré le plus quand tu étais plus jeune et encore aujourd’hui ?

Messi. Jamais de ma vie j’aurais pu imaginer que je jouerais un jour contre lui. J’ai grandi avec lui, c’était un rêve de l’affronter… J’étais là lors de son premier match, c’était magnifique (à Reims, le 29 août 2021 ndlr). Tous les supporters étaient venus pour lui (rire). Chaque joueur essaye de faire abstraction quand il joue contre lui mais… Tout le monde criait quand il touchait la balle ce jour-là.

Aujourd’hui encore c’est Messi le plus fort. C’est le meilleur de tous les temps. Y’a pas plus grand que lui. C’est le meilleur de tous les temps.

Paul Avignon